Histoire de l’assassinat de
Jean Thibault Sieur de la Pintrolière
dans le village de
Beaurepaire en 1728
Voici donc la mystérieuse et véritable histoire
de l’assassinat du Sieur de la Pintrolière,
au village de Beaurepaire en Vendée, en juillet 1728 …
DÉCOUVERTE du CORPS
Vers 4 heures 30 du matin, dès la prime aurore 1 du 27 juillet 1728, la jeune « Suzon » Suzanne CHEDANEAU, servante à Beaurepaire, fut la première à découvrir un corps gisant sur le sol, près de la Croix de pierre 2, et veillé par un chien qui se jeta sur elle quand elle voulut s’en approcher. Toute apeurée par cette vision, elle continua son chemin 3, n’ayant pas le courage d’annoncer sa macabre découverte.
Vers 4 heure 45, Laurence BRIN et sa fille 4 Perrine BERNARD, de la Coussais, trouvèrent sur l’herbe du sol, près de la Croix de pierre du village de Beaurepaire, la dépouille mortelle de Jean THIBAULT sieur de la Pintrolière dont le corps 5 gisait sur le dos, face au ciel, les yeux ouverts, les jambes largement écartées, le flan et son bras gauche en parties calcinées se consumaient encore ! A sa droite se trouvait son fusil encore armé et bandé, et à sa gauche l’herbe du sol était brûlée sur environ 50 cm. Il n’y avait aucune trace de sang sur les restes de ses vêtements, ni sur le sol !
NORD
Cette carte de 2015, ci-dessus, permet de faire des comparaisons avec celle du cadastre napoléonien, qui sont toutes deux quasiment au même format : les lignes jaunes représentent les emplacements des anciens domaines du château de Beaurepaire et du logis de la Coussais. Les lignes bleus représentent les anciennes routes ou chemins, et celles en oranges les entourages des anciens édifices, et des château et logis susdits.
Carte extraite de l’ancien cadastre napoléonien de 1839, section B du bourg
de Beaurepaire
(Archives Départementales de la Vendée, en ligne)
1) Les heures indiquées sont en heures solaires locales. Ainsi, le 27 juillet 1728 à Beaurepaire le soleil se levait à 4 h 25 et se couchait à 19 h 15.
2) La Croix de pierre (représentée sur le plan de 1839 ci-dessous) se trouvait proche
du bourg, au carrefour des anciennes voies menant de Beaurepaire aux Herbiers à main
gauche et vers la Barotière à main droite. Au regard de ces deux cartes, ci-dessous,
je crois que cette croix devait se trouver à gauche du bout du petit chemin qui arrive
dans le virage de l’actuelle rue de l’espérance et à peu près à l’entrée du parking
du foyer les Hirondelles. L’ancienne route qui mène à la Barotière passait au nord
du petit étang qui se trouve à l’ouest de la Coussais.
3) La jeune Suzon était sortie
au lever du soleil à la recherche de ses canes qui, la veille, n’étaient pas rentrées
comme de coutume.
4) Laurence BRIN et sa fille étaient sorties de bon matin pour aller glaner dans
les champs.
5) Les descriptions corporelles mentionnées dans les enquêtes indiquent
aussi qu’il était gros et gras.
Vers les 5 heures du matin, la rumeur publique commençait à se répandre, et le jeune Lucas du village de la Coussais dit à la mère BOUDAUT : « Il y a un corps mort à la Croix de pierre, ils disent que c’est Monsieur de la Paintrolière, ce l’est bien sûr, et il brûle à un bras ».
Vers 5 heures 15, trois gentilshommes 6 : René BRUNEAU, René Léon DOINEAU et Paul MESSINE ayant eux aussi appris cette macabre nouvelle se rendirent au carrefour de la Croix de pierre et purent voir le corps du sieur de la Paintrolière que le feu dévorait encore.
6) Ces 3 gentilshommes avaient passé la soirée du 26 juillet 1728 avec le Sieur de la Paintrolière chez le sieur de Beaurepaire. Voir un peu plus bas une description détaillée de chacun d’eux et le contexte de cette soirée précédant cet assassinat, dans lequel ils furent soupçonnés.
Vers 5 heures 30, Marie LESVIN femme du charpentier BAUDRY, alla quérir de l’eau pour asperger les zones encore ardentes des parties calcinées du corps.
Vers 9 heures du matin, la juridiction seigneuriale de Beaurepaire 8 se saisit de ce crime, et désigna deux hommes pour garder le cadavre, ce qui n’empêcha pas Perrine CHIRON domestique du sieur de la Paintrolière de retirer des poches du défunt et emporter les objets suivants : un écu de 6 livres et 3 ou 4 sols (environ 75 euros), un couteau, une tabatière, un mouchoir, un sac de plomb de chasse et un petit reliquaire.
PREMIÈRES CONSTATATIONS
Vers 16 heures, Jacques-Honoré GUYARD Sénéchal de Beaurepaire arriva (enfin !) sur les lieux pour procéder à la lever du cadavre ; où il nota dans son procès-verbal : que l’habit, la chemise et la culotte du sieur de la Paintrolière étaient brûlées du côté gauche et que les chairs de son bras gauche ainsi que celles du tronc depuis le cou jusqu’à la cuisse gauche 7 étaient aussi brûlées, et il releva une plaie dans la poitrine également du côté gauche ; mais là encore sans trace de sang !
7) Nota : la longueur entre le cou et le milieu de la cuisse représente 80 à 90 cm suivant la corpulence des hommes. Ce qui pourrait laisser comprendre que le corps du sieur de la Paintrolière aurait été disposé dans l’âtre d’une cheminée sur un gril d’environ 80 cm et que sa tête et ses jambes dépassaient de chaque côté.
AUTOPSIE
Peu après, le cadavre fut transporté au parquet de la juridiction de Beaurepaire 8 où le chirurgien René RANGEARD de la Gaubretière pu l’autopsier et noter dans son rapport les détails suivants : un trou de la largeur d’un doigt sous le sein gauche semblant provenir d’un coup de fusil ou de pistolet qui avait touché la rate, l’épiploon et une vertèbre costale ; sans découvrir la balle. Il indiqua aussi, qu’il fut pressé dans son intervention par le curé de Beaurepaire qui souhaitait inhumer le corps le jour même.
8) L’ancienne juridiction seigneuriale de Beaurepaire à cette époque se trouvait être dans le logis construit au XVème Siècle par Catherine de THOUARS, appelé le « Grand Logis », lequel a été restauré en 1992 et est situé dans le bourg de Beaurepaire actuellement rue du 8 mai, à une centaine de mètres de l’église, comme on peut le voir sur ces deux photographies.
INHUMATION
En effet, après l’autopsie et donc en fin d’après-midi, Messire BERRIAU curé de Beaurepaire, s’empressa de mettre en sépulture le corps, puisque le même jour, 27 juillet 1728, il mentionne, laconiquement dans le registre paroissial 9, son inhumation dans l’église de Beaurepaire 10 ; dont ci-dessous la transcription littérale et complète de l’acte :
Le vingt sept jüillet mil sept cent vingt hüit le corps de Monsieur Jean Thibaud sieur de la Pintrolière âgé de vingt six ans a été inhumé en l’église de cette paroisse en présence de Jean Saudeau, Jean Boudaud, et de plusieurs autres qui ont déclaré ne savoir signer
9) Réf : archives départementale de la Vendée - Registres paroissiaux de Beaurepaire
- Années 1725-1736 - Vue 23 gauche en haut.
10) L’église de Beaurepaire semble avoir
été construite vers 1450 par Catherine de Thouars veuve de Gilles de Rais, sous la
forme d’une chapelle rectangulaire, non loin du Grand Logis qui était sa résidence.
Comme on peut le voir sur le plan cadastral, on constate qu’en 1839 cette église
n’a pas encore été remaniée. C’est quelques années plus tard qu’elle fut agrandie.
Ainsi l’ancienne église et l’ancien chœur de l’église se retrouve être le transept
de l’église actuelle. On y voit encore sur la photo ci-dessous l’ancienne entrée
de l’église.
Avant de parler de l’enquête et des interrogatoires qui s’ensuivirent, dès le 28 juillet par la haute justice seigneuriale de Beaurepaire, il convient de parler de l’exhumation du corps et de la deuxième autopsie. Dès le 30 juillet la justice royale s’était emparée de l’affaire ; mais ce n’est que 21 jours après le décès du Sieur de la Paintrolière, que la maréchaussée par son assesseur André BONNIN Prévôt de Montaigu ordonna une nouvelle autopsie, tant par suspicion, que compte tenu de l’ordonnance criminelle d’août 1670 qui exigeait que les autopsies fussent pratiquées non pas par un chirurgien mais par un médecin.
EXHUMATION & NOUVELLE AUTOPSIE
Ainsi, le 17 août 1728 fut entreprise l’exhumation du corps afin de procéder à une nouvelle autopsie. Tous les assistants présents dont : André BONNIN et son greffier BELLOUARD, René RICHARD docteur en médecine à Boussay et Gabriel FILOUSEAU chirurgien à Montaigu avaient préalablement largement été abreuvés de vin et d’eau de vie par la famille du défunt à tel point que le chirurgien Filouseau s’affala ivre mort devant la porte de l’église après cette intervention ! C’est ainsi, dans ce contexte alcoolisé surréaliste, que la grande tombe qui se trouvait à côté du grand autel 11 fut ouverte et le cercueil, tiré par des cordes, amené jusqu’au milieu de l’église de Beaurepaire pour être ouvert à grands coups de pied par un rustre et ivre cavalier de la maréchaussée ! Le cadavre fut découvert entouré de chaux vive nouvellement mise, ce qui fit que les « experts » présents soupçonnèrent qu’elle avait été disposée après l’inhumation dans le but de dissimuler la manière dont avait été assassiné le sieur de la Paintrolière. Cette nouvelle autopsie n’apporta pas grande chose. Il fut vérifié que son corps en décomposition était brûlé sur son côté gauche, qu’une blessure traversait la poitrine, et constaté que l’aorte avait été coupée, qu’aucune côte ni vertèbre avait été rompue, et qu’aucun projectile ne se trouvait dans le cadavre, ainsi que plusieurs contusions en divers endroits que la première autopsie n’avait pas signalé. Les experts ne purent déterminer exactement avec quelle arme ce coup mortel avait été donné ?
11) La photographie ci-dessus nous montre une partie de l’ancien chœur dans le transept actuel de l’église de Beaurepaire. C’est à cet endroit que fut inhumée, sous une pierre tombale, la dépouille de Jean THIBAULT sieur de la Paintrolière. Ci-dessous le retable polychrome de Saint-Laurent daté de 1668 au chef duquel se trouve le blason des GIRARD seigneurs de Beaurepaire (d’azur à trois chevrons d’or).
Jean THIBAULT sieur de la Paintrolière
Jean THIBAULT écuyer sieur de la Paintrolière est décrit comme un homme célibataire, oisif, gros, gras, jouisseur, joueur vindicatif et querelleur. Il vivait avec sa mère et ses frères et sœurs au logis de la Paintrolière. Ses divertissements étaient la chasse, la boisson, les repas et le jeu partagés avec ses amis nobles ou bourgeois, dans les auberges alentours ou bien dans leurs logis.
C’était le 3ème enfant et 1er garçon d’Agathe GUERRY 12 dame de la Paintrolière et de Jean THIBAULT sieur de la Pinière 13 son père décédé en 1724. Puis, son frère Pierre THIBAULT 14 né en 1709 hérita de ses biens, comme héritier principal, du fait de sa mort précipitée en 1728.
12) Agathe GUERRY, sa mère, avait hérité du fief de la Paintrolière de Paul GUERRY qui semble être son oncle décédé en 1700 à Beaurepaire. Elle était fille de René GUERRY sieur de la Goursière (en Tiffauges /85) et de Catherine GIRARDIN sa mère décédée en 1714 à Boussay (44). Elle naquit vers 1675 et se maria le 3 mai 1695 en la paroisse de Saint-Michel à Poitiers avec Jean THIBAULT sieur de la Pinière. Elle est décédée entre 1728 et 1758.
13) Jean THIBAULT, son père, sieur de la Pinière (en Tiffauges) né vers 1670, décéda en 1724 à Beaurepaire. Il était fils de Jean THIBAULT sieur de la Pinière et Dame [?] HULLIN et petit-fils de Jean THIBAULT et de Françoise BOUCHER. Il avait déjà fait une brillante carrière dans la compagnie de la Garde puis dans la cavalerie de l’armée du Roi lorsqu’il se maria avec Agathe GUERRY sous le grade de lieutenant de cavalerie. Comme il avait reçu, lors de ses campagnes militaires, une blessure qui l’empêchait de servir à cheval ; il fut pourvu de la charge de Major Général des Garde-Côtes des Sables d’Olonne, puis en devint le Lieutenant Général. Il fut anobli par lettre patentes de Louis XV en septembre 1718 et portait les armes suivantes : d’azur à 3 molettes d’éperon d’or à l’écu timbré d’un casque de profil.
14) Agathe GUERRY et Jean THIBAULT eurent 9 enfants. Le 6ème enfant et 2ème garçon de ce couple nommé Pierre THIBAULT de la Pinière né le 20 juin 1709 au Longeron (49) se maria le 15 novembre 1734 en la paroisse de St-Maurille d’Angers avec Marie GOYET et décéda le 2 février 1755 à Angers. De ce couple est issu Pierre René THIBAULT de la Pinière né à Angers le 20 novembre 1737 et marié le 25 août 1772 à Notre Dame de Nantes avec Anne-Sophie PLU de la Guilloterie. Et de ce dernier couple est issu Rose-Sophie THIBAULT de la Pinière née le 20 septembre 1775 paroisse St-Denis de Nantes : c’est elle qui hérita (en tant qu’héritière principale) d’une grande partie des biens des THIBAULT de la Pinière qui furent confisqués et qu’elle racheta après la révolution : la Pinière (Tiffauges), la Poutière (La Bruffière), la Gourcière (Tiffauges), la Paintrolière (Beaurepaire) et la Chaillouère (Les Herbiers).
Une vengeance de la famille GAZEAU ?
L’année précédente en juin 1727, chez la dame Masson, cabaretière du Boupère (Vendée), Jean THIBAULT sieur de la Paintrolière, avait gagné aux cartes 30 ou 40 pistoles au sieur GAZEAU du Plessis 15 et s’apprêtant à aller se coucher dans une chambre du cabaret, son partenaire voulu le forcer à continuer la partie. Alors une querelle s’ensuivit ; au cours de laquelle le sieur de la Paintrolière tua d’un coup d’épée le malheureux GAZEAU. Il vivait depuis dans la crainte d’une vengeance des parents ou amis de sa victime ou de l’action judiciaire car il n’avait pas encore obtenu ses lettres de grâce au moment de son décès. (Audition par François Allard, lieutenant-prévôt à Fontenay-le-Comte de Louis Baptiste Arnou jardinier, le 11 mars 1731, rapportant les circonstances du décès de Gazeau).
15) Pour l’instant, je n’ai pas retrouvé qui était ce GAZEAU sieur du Plessis ; et la généalogie des Gazeau qui a été publiée ne mentionne pas ce fait ? Toutefois, on découvre dans cette généalogie un certain écuyer Charles Gabriel GAZEAU 17 sieur de l’Ansonnière et du Plessis originaire des Essarts, fils de Charles GAZEAU sieur du Plessis et de Charlotte GUESNEAU marié le 6 juillet 1699 aux Magnils (Vendée) avec Marie de la BOUCHERIE (fille de Pierre de la BOUCHERIE sieur du Fief et de Louise REGNAULT demoiselle de la Barre), laquelle veuve vers 1710 se remarie avec Philippe-Benjamin GRELIER sieur de Concise. Est-ce que Charles Gabriel GAZEAU et Marie de la BOUCHERIE ont eu un fils qui serait celui qui a été tué par Jean THIBAULT de la Paintrolière ?
A tel point que Pierre BARANGER métayer de la Chaillouère indique qu’à la mi-avril 1728, il vit deux hommes à cheval dont l’un dit à l’autre : « Voilà Puygreffier 16 et voilà la maison où demeure celui qui a tué Monsieur GAZEAU, pauvre monsieur, sa vie ne sera pas longue … on se propose de le tuer ». (Déposition de Pierre Baranger devant le sénéchal de Beaurepaire, le 6 septembre 1728).
16) Comme on le voit sur la carte ci-dessus, les deux cavaliers ne pouvaient apercevoir à la fois les logis de Puy-greffier (Saint-Fulgent) et de la Pintrolière (Beaurepaire), sans être sur un point culminant, étant donné qu’entre ces deux lieux il y a 2 kms à vol d’oiseau ! Pierre BARANGER métayer de la Chaillouère les a probablement rencontrés à la position culminante que j’indique et qui est marquée actuellement par une vieille croix de pierre ? On peut aussi se poser la question : pourquoi l’un des deux cavaliers indique la position de Puy-Greffier par rapport à la Pintrolière, si ce n’est pour indiquer à l’autre cavalier qui connaît bien Puy-Greffier où se trouve la Paintrolière ? Or, il faut savoir que Puy-Greffier dépendait de la châtellenie de Saint-Fulgent et que le seigneur de Saint-Fulgent n’était autre qu’un membre de la famille GAZEAU !
En effet, la châtellenie de Saint-Fulgent passa dans la famille des Gazeau de la Brandanière par le mariage de Pierre Louis GAZEAU 18 seigneur du Ligneron en date du 22 février 1694 en la paroisse St-Jean-Baptiste de Montaigu avec Magdelaine Victoire BERTRAND fille aînée et principale héritière de noble René Bertrand seigneur de Saint Fulgent et de Marie Loyseau (AD de Vendée – Archives en ligne vue 80/114).
17) Charles Gabriel GAZEAU sieur du Plessis marié avec Marie de La BOUCHERIE était cousin au second degré avec Pierre Louis GAZEAU 18 sieur du Ligneron marié avec Madeleine Victoire BERTRAND, et avaient comme ancêtres communs leurs bisaïeuls Jacques GAZEAU et Jacquine VIGIER.
18) Pierre Louis GAZEAU et Madeleine Victoire BERTRAND eurent 8 enfants dont les deux premiers sont Louis Gabriel GAZEAU 19 et Eugène Victor GAZEAU 20 baptisés à St-Jean-Baptiste de Montaigu ; dont l’un d’eux pourrait bien être le commanditaire ou celui qui aurait pu venger le meurtre de son cousin GAZEAU du Plessis, en supposant que le sieur de la Paintrolière eut été assassiné par vengeance :
19) Louis Gabriel GAZEAU sieur de St-Fulgent et de la Sauvagère baptisé à Montaigu le 17 novembre 1694 (vue 84/114), fut condamné à mort pour avoir tué Mr. de Montsorbier, mais obtint sa grace en 1719. En 1720, d’autres disent en 1728, il vendit la châtellenie de St-Fulgent à un négociant de Nantes, nommé Joachim Descaseaux du Hallay, pour le prix de 122.700 livres ! Il se maria avec Sophie Louise Madeleine Olympe de BONNESTAT et décéda avant 1740.
20) Son frère, Eugène Victor GAZEAU sieur de Ramberge (La Gaubretière) fut baptisé aussi à Montaigu le 2 décembre 1696 (vue99/114) et se maria en première noce avec Jeanne LE BŒUF dame de Ramberge, puis en seconde noce le 9 août 1740 (vue 28/262) à Beaurepaire avec Jeanne JARIE, et y fut inhumé le 12 août 1761.
LA LÉGENDE
et les rumeurs publiques
Comme dans toutes ces histoires de meurtres, dès le début, les rumeurs publiques s’enflent par l’imagination ou l’ignorance, l’aigreur et l’incompréhension, des gens qui ont entendu d’un autre des hypothèses plus ou moins farfelues sans réserve ni aucune preuve ! Puis le temps et les générations passent et nivellent la réalité. C’est comme cela, qu’en 1900, cette vieille histoire passée à Beaurepaire en 1728, se trouve racontée et déformée par les habitants du village puis recueillie pour être imprimée par le créateur de ces cartes postales sous la forme d’une vieille légende :
Ces deux vues nous montrent le Château de Beaurepaire encore debout dans les années 1900 et aujourd’hui détruit et rasé. Évidemment cette histoire affabulatrice, déformée et colportée depuis près de 170 ans sur 6 ou 7 générations par les gens du pays, fut une légende très « accrocheuse » pour le vendeur et fabriquant de ces cartes postales …
De nombreuses fenêtres du château sont partiellement ou entièrement bouchées : c’était une manière de diminuer la taxation de chaque demeure du fait de l’impôt sur les portes et fenêtres en France entre 1798 et 1926 ! (Collection des Archives de Vendée).
Ainsi j’ai été induit en erreur, il y a trois ans, par cette légende imprimée sur les cartes postales !
On constate en effet, comme mentionner plus bas dans mon texte, que lors des deux autopsies pratiquées sur le sieur de la Paintrolière, il n’est fait aucunement mention qu’il a été embroché et encore moins châtré comme certaines femmes du village en colportaient la rumeur, ni non plus qu’il fut tué à la suite d’un pari insensé !!
C’est la raison pour laquelle j’ai repris tout mon texte de 2013 ; que je propose aujourd’hui en 2016 entièrement revu et corrigé à partir de cette excellente et très sérieuse étude sur l’assassinat du sieur de la Paintrolière (ou Pintrolière), réalisée par Gérard JAROUSSEAU puis prononcée dans un discours le 26 janvier 1975 lors de la séance publique de la Société des Antiquaires de l’Ouest et imprimée dans la revue pages 13 à 29. Cette étude fait référence à de nombreux documents authentiques, sur l’enquête de ce meurtre, compulsés tant dans les Archives départementales que Nationales sur les manuscrits et sur des textes imprimés d’époque.
Le supplément que j’apporte à cette étude consiste en de multiples notes et indications d’ordres géographique, généalogique, ainsi que des supports imagés et photographiques : il aura fallu trouvé l’endroit de la Croix de Pierre, aussi le lieu où se trouvait l’ancien château de Beaurepaire dont certain l’on confondu avec le Grand-Logis qui était à cette époque le lieu de la juridiction de Beaurepaire, retracé les anciennes voies de Beaurepaire vers la Barotière et vers les Herbiers et essayer de comprendre comment un cavalier pouvait voir les logis de Puy-greffier et de la Paintrolière distant de 2 kms, et tout cela par rapport au cadastre Napoléonien, l’état des sections du dit cadastre et les vues par satellite.
Ce qui est certain, c’est que le Sieur de la Paintrolière a été trouvé mort au pied de la Croix de Pierre centrée à environ 200 mètres du Château de Beaurepaire et du logis de la Coussaie, dans des circonstances assez effrayantes et peu ordinaires relatées par des constatations et autopsies décrites dans les textes ci-dessous.
En lisant ces textes, vous constaterez que cette affaire n’a jamais vraiment été
résolue tant aux sujets du mobile et de l’arme du crime que du nom de ou des assassins.
Bien sûr, il y eut les interrogatoires et les enquêtes d’époque qui vous permettront
tout comme moi d’étayer une hypothèse tangible ; mais je me garderai bien de vous
proposer la mienne … Peut-être qu’un médecin légiste actuel au regard des autopsies
décrites et du contexte arriverait à définir l’arme du crime … ? Peut-être qu’un
jour on arrivera à « détricoter » le vrai du faux à la lecture des textes ci-dessous
et de leurs contradictions basées sur les interrogatoires … ? Ou bien, faut-il juger
une partie de la société de l’époque, avec ces privilèges ; dont mes notes relatent
d’autres meurtres qui pour la plupart ont été graciés par le Roi … ?
« Quelques seigneurs, réunis au château, engagèrent un pari insensé, il s’agissait de tirer au sort pour savoir lequel serait mis à la broche. Le pari fut exécuté, et l’un d’eux fut embroché et rôti. Le lendemain le cadavre fut retrouvé par les habitants dans l’une des rues du bourg. »
Façade sud-ouest
Façade nord-est
La soirée au Château de Beaurepaire le 26 juillet 1728, veille du meurtre
Les enquêtes nous apprennent que le Sieur de la Paintrolière avait passé, la veille de son assassinat, la soirée au Château de Beaurepaire avec d’autres convives dont ci-dessous la liste :
Jean THIBAULT de la Paintrolière avait passé une partie de la journée du 26 juillet au Château de Beaurepaire. En effet, dès 14 h 30 il était en compagnie du seigneur du lieu et de 7 autres convives. Ainsi, les 9 personnes réunies au Château de Beaurepaire jouèrent aux cartes, burent quelques coups, puis dînèrent et tout cela sans aucune dispute ni altercation.
Vers 22 heures , deux convives partirent et vers 23 h Françoise GERMON, servante à Beaurepaire, amena 6 bouteilles de vin et BONINEAU le domestique en amena 4 autres pour les 7 convives qui restaient.
1/ Eusèbe GIRARD Chevalier seigneur de Beaurepaire, âgé de 31 ans, était fils de
Eusèbe GIRARD et de Suzanne ROBERT et se maria le 19 mars 1714 avec Renée Elisabeth
BOUTILLER de Belleville. Il n’avait pas hésité à tuer d’un coup de pistolet un paysan
qui l’aurait insulté et maltraité, mais fut toutefois gracié par le Roi, pour ce
meurtre ! Le 26 juillet il revint de la chasse avec René BRUNEAU vers 14h30 pour
y trouver chez lui : Jarrie, Audureau, Doineau, Corbière, Messine et la Paintrolière.
Le lendemain matin, Françoise GERMON le trouva endormi la tête sur la table et rien
n’était en désordre dans la pièce où elle ne vit ni sang, ni feu, ni cendre !
2/ René Léon DOINEAU chevalier seigneur de Champblanc (paroisse Sainte-Florence). Signe particulier : borgne – Agé de 35 ans. Baptisé le 5 mai 1693 en la paroisse de Saint-Cécile, il était fils de Jean-Charles DOINEAU seigneur des Doues et de Marie-Madeleine BONNIN, et petit-fils de Julien DOINEAU marié en 1661 à Louise GRELIER, veuve de Jacques DORIN. Son propre neveu âgé de 11 ans, fils de Léonard de VERTEUIL seigneur de feuillas et de Elisabeth Eléonore DOINEAU (mariés le 2 novembre 1712 à Sainte-Florence), fit part au sacristain, qu’il avait entendu dire dans le village que René Léon DOINEAU était l’un des assassins. Louis YOU se laissa aller dire aux enquêteurs que DOINEAU lui avait déclaré qu’il ne fallait pas qu’il aille dire qu’il avait entendu un coup de fusil dans la nuit, parce que cela serait la perte du sieur de Beaurepaire.
3/ René BRUNEAU écuyer seigneur du Plessis, célibataire était un familier et ami
du seigneur de Beaurepaire - Célibataire âgé de 29 ans. Le 26 juillet il revint de
la chasse avec Eusèbe GIRARD vers 14h30.
5/ Pierre CORBIERE écuyer, sieur de la Coussais (en Beaurepaire), docteur en médecine,
il buvait, mangeait et couchait au château de Beaurepaire – Protestant et célibataire
âgé de 28 ans.
6/ Paul MESSINE bourgeois, sieur de la Pinardière, demeurait à la Roche (paroisse
Saint-Mars-des-Près). Il avait été invité par René Léon DOINEAU et engagé à venir
chez lui en son logis du Champblanc le 25 juillet, lequel lui présenta une de ses
sœurs pour un futur mariage, et le lendemain 26 juillet, veille du meurtre, il continua
son périple sur l’invitation de DOINEAU pour y chasser sur les domaines de Beaurepaire.
Ce fut la première fois qu’il vint à Beaurepaire et il ne connaissait pas auparavant
Eusèbe GIRARD seigneur de Beaurepaire, ni le sieur de la Paintrolière. A moins d’un
coup de folie, on peut croire que Paul MESSINE n’est pas l’auteur de cet assassinat
au regard des circonstances de sa venue au château de Beaurepaire. Il était âgé de
21 ans.
7/ Pierre AUDUREAU bourgeois, sieur de la Gagnerie, licencié ès lois, demeurait au
bourg Saint-Georges de Montaigu. Il était âgé de 31 ans. Il partit après le diner
vers 22 heures.
8/ Jacques JARRIE prêtre et vicaire de la paroisse de Beaurepaire
- 34 ans. Il partit après le diner vers 22 heures.
Jarrie et Audureau partient vers 22 heures ; les 7 autres personnes continuèrent à jouer aux cartes. Puis vers minuit ou 1h du matin du 27 juillet la Paintrolière partit à son tour.
Vers 2 heures du matin, Louis SACHOT jardinier de Beaurepaire et quelques autres personnes du village entendirent un coup de fusil ou de pistolet du côté de la Coussaie en direction de la Croix de Pierre.
Voilà la situation ci-dessus décrite pour chaque personnage ayant passé la soirée au château de Beaurepaire.
LES ENQUÊTES & INTERROGATOIRES
La juridiction seigneuriale de Beaurepaire qui détenait la haute justice se saisit de ce crime et dès le matin du 27 juillet 1728, Jacques-Henri GUYARD, sénéchal de Beaurepaire, avocat au Parlement, fit les premières constatations dans son procès verbal.
Mais dès le 30 juillet 1728 c’est la justice royale, la maréchaussée générale du Poitou, qui s’empara de l’affaire, et André BONNIN assesseur du prévôt à la résidence de Montaigu ordonna l’ouverture d’une information. Il suspecta dès le début les gentilshommes présents à la soirée au Château de Beaurepaire : Girard st son domestique Bonineau, Doineau, Bruneau, Messine et Corbière. Lesquels s’étaient d’ailleurs enfuis ou cachés.
A tel point que le 26 août 1728 un mandat d’arrêt fut décerné contre eux.
Mais la maréchaussée redoutant quelques remous dans l’opinion à Beaurepaire, ne commença ces perquisitions aux domiciles des accusés que le 5 octobre 1728.
Cette recherche fut vaine et faute de pouvoir mettre la main sur les accusés en fuite, le procureur du roi dès le 5 novembre 1728 s’en prit aux domestiques de Girard de Beaurepaire et les accusa de complicité d’assassinat et demanda par conséquent l’arrestation de :
Louis YOU, dit Latran - 73 ans
Claude BONINEAU domestique, dit Castille - 30 ans (celui qui s’enfuit avec Eusèbe GIRARD son seigneur)
Françoise GERMON servante, veuve de Vincent LUCAS - 40 ans
Ainsi, le 30 novembre 1728, 4 mois après cet assassinat, Louis YOU et Françoise GERMON furent appréhendés et conduits à la prison de Montaigu.
Quinze jours après, le 14 décembre 1728, Françoise GERMON fut remise en liberté.
Entre temps, le 29 décembre 1728 le procès fut retiré de la maréchaussée du Poitou et passa au siège présidial de Poitiers sous la direction du juge Jean-François COTHEREAU.
Et un mois plus tard, le 3 janvier 1729, Louis YOU fût également remis en liberté.
Liberté
qui ne durera pas, comme on va le voir un peu plus tard …
Le 8 février 1729 - Les 3 gentilshommes et 2 bourgeois qui avaient pris la fuite étaient toujours recherchés assidûment dans tout le royaume de France ; et même au-delà des mers, comme on peut le constater par la lettre datée du 26 avril 1729 que je viens de découvrir, et dont voici la transcription littérale remise en écriture et orthographe actuelle :
« Colonies - M. De Champigny et d’Orgeville - 26 avril 1729
Monseigneur,
Nous avons reçu la lettre que vous nous avez fait l’honneur de nous écrire le 8 fevrier dernier avec les signalements de trois gentilshommes et de deux bourgeois de la Province de Poitou accusez d’avoir assassiné le Sieur Thibault de la Pintrollière. Nous faisons faire toutes les perquisitions possibles dans les quartiers de l’île et dans les îles de la Grenade, et de Marie Galante ou nous avons envoyé lesdits signalements. Nous espérons que par les précautions de l’ordonnance que nous avons rendue au sujet des étrangers et des nouveaux venus de France, dont nous vous avons envoyé copie, nous découvrirons ceux de ces cinq accusés qui se seront retirés dans ces îles, et au cas qu’il soient découverts, nous les ferons arrêter et mettre sous bonne et sûre garde, nous les consignerons au premier Capitaine de navire qui partira pour France avec ordre de les remettre dans les prisons du port où il débarquera. Nous aurons l’honneur de vous en donner avis.
Nous sommes avec un très profond respect Monseigneur - Vôtres humbles et très obéissants
Serviteurs.
Au fort Royal de la Martinique
Le 26 avril 1729
Signé : CHAMPIGNY et DORGEVILLE »
Réf : Archives nationales d’Outre-Mer (Martinique correspondance) - cote FR ANOM COL Cba 40 Fa 61
Le juge Jean-François COTHEREAU ne s’empressa pas à remplir sa charge, puisque ce ne fut qu’à la fin du mois de juillet et début août 1729 qu’il allât recueillir les dépositions de 35 témoins dans une salle de l’auberge du cheval-blanc aux Herbiers.
Puis finalement le grand conseil renvoya les accusés devant le prévôt de la maréchaussée
du Poitou à Montaigu leur précèdent juge en date du 14 septembre 1729. Le lieutenant
du prévôt n’avait donc qu’à poursuivre la procédure qu’il avait jadis commencée et
il fit assigner les accusés en fuite afin de pouvoir instruire la contumace.
Puis
du 27 avril au 25 mai 1730 il se rendit à Chantonay et aux Herbiers procéder à l’audition
de 48 témoins.
De toutes ces auditions il ressort un élément important de supplément d’information.
En effet un an avant, c’est-à-dire aux environs du mois de mai 1729, Louis Prosper
PROUST sénéchal de Saint-Fulgent étant chez Henri GAZEAU baron de Champagné dans
son château des Villates en la paroisse de Chantonay vinrent à parler de l’assassinat
du sieur de la Paintrolière. C’est alors qu’Henri GAZEAU lui fit part du récit de
Guy CAMBRANT procureur fiscal de la châtellenie de la Tabarière demeurant à Chantonay
lequel avait pendant quelques temps accueillis les deux accusés CORBIERE et MESSINE.
Voici donc les propos de Guy CAMBRANT et d’autres versions qui semblent se recouper :
Une altercation avec Eusèbe GIRARD sieur de Beaurepaire
Un mois et demi avant cet assassinat, au cours de la nuit du 13 juin 1728, Jean THIBAULT de la Paintrolière avait eu aussi une violente altercation avec Eusèbe GIRARD seigneur de Beaurepaire à cause d’un billet de jeu qu’il gagna et là encore ; ne souhaita plus continuer la partie. Le seigneur de Beaurepaire lui fit remarqué que « un honnête homme n’en usait pas ainsi ». Peu de temps après, lors de leur réconciliation, le seigneur de Beaurepaire l’apostropha en ces termes : « Seras-tu toujours fou, mon pauvre Paintrolière ? Si toute le monde l’était comme toi, on se couperait la gorge ». Une autre version indique : « il arriverait du bruit ».
Une vengeance de DOINEAU et BRUNEAU amis de Beaurepaire ?
Lors de la soirée et nuit du crime, ignorant leur réconciliation, DOINEAU, BRUNEAU et CORBIERE faisaient quantité de signes et de grimaces au sieur de la Paintrolière qu’ils forçaient à boire. Beaurepaire s’en étant aperçu leur dit : « Pourquoi l’accablez-vous tant, quand on se bat à armes égales cela vaut beaucoup mieux, ainsi prenez du vin comme lui ! » Et en disant cela, il ôta du vin du verre de la Paintrolière et le mit dans le sien. Peu de temps après Beaurepaire se trouva tout à fait ivre et s’endormit …
DOINEAU se leva de table, comme pour aller attiser le feu, et à cet effet prit des pinces et comme la Paintrolière était assis le dos au feu, DOINEAU le prit au cou avec les pincettes et le renversa. Alors BRUNEAU sauta dessus, et l’un deux lui donna des coups de couteau … Puis ils le mirent à griller dans la cheminée, mais l’odeur s’en dégageant, ils le retirèrent du feu et l’un d’eux chercha une civière dans la cour avec laquelle ils portèrent le cadavre à la Croix de Pierre.
Puis DOINEAU et BRUNEAU forcèrent, le couteau à la gorge, CORBIERE et MESSINE de donner quelques coups au Sieur de la Paintrolière, même après sa mort.
Ci-dessus une photographie de la Coussaie à Beaurepaire. C’est dans cet ancien logis que demeurait Pierre CORBIERE écuyer sieur de la Coussais a 200 mètres de la Croix de Pierre. Où a-t-il dormi durant la nuit du 26 au 27 juillet 1728 : chez lui à la Coussais ou bien au château de Beaurepaire ? Pourquoi n’était-il pas présent vers 5 h 15 du matin avec les 3 autres sieurs devant le corps de la Paintrolière gisant près de la Croix de Pierre ?
Les véritables victimes de ce procès
Le 29 mai 1730, la maréchaussée pensant toujours que les domestiques savaient plus de choses qu’il ne voulait en dire ; Louis YOU et Françoise GERMON, domestiques, furent de nouveau interroger au château de Beaurepaire par le sieur Marc CLERTE écuyer sieur de la Mauvinière et prévôt général de la maréchaussée du Poitou.
La publicité faite à ce crime par des mémoires et libelles imprimés, tant dans l’intérêt des accusés que pour celle de la famille du sieur de la Paintrolière, dépassait largement la province du Poitou, et en raison de l’importance prise par l’affaire connu désormais dans la France entière ; le conseil d’état par un arrêt du 28 juin 1730 décida de juger le procès des assassins de la Paintrolière au présidial de Poitiers.
Ainsi le prévôt général du 9 au 14 août 1730 se mit en campagne et lança un détachement
de cavaliers aux trousses des accusés qui auraient trouvé refuge dans la région de
Châtellerault : mais en vain ne les trouvèrent …
Plus de deux ans après cet assassinat, le 16 septembre 1730, par ordre de réintégration, les susdits Louis YOU et Françoise GERMON furent de nouveau arrêtés et incarcérés, à la prison de Poitiers, ainsi que deux jours plus tard : les autres domestiques de Eusèbe GIRARD sieur de Beaurepaire, à l’exception de Charlotte CHESSÉ qui ayant quitté Beaurepaire un an auparavant, ne put être appréhendée. Puis le 28 septembre 1730 les 3 sacristains de Beaurepaire.
Voici donc la liste des 8 emprisonnés de Beaurepaire dans des conditions misérables,
tout d’abord à la prévôté de Poitiers, puis à partir du 19 juin 1731 à Paris à la
Conciergerie :
- Louis YOU dit Latran, domestique et piqueur de chasse (décédé à la Conciergerie entre le 19 juin 1731 et le 24 mars 1733)
- Françoise GERMON, servante et officière (décédée à la Conciergerie entre le 19 juin 1731 et le 24 mars 1733)
- Charlotte BENOIT domestique
- François BONNET domestique (décédé à la Conciergerie entre le 19 juin 1731 et le 24 mars 1733)
- Louis SACHOT domestique (décédé dans sa geôle à Poitiers, le 25 mars 1731)
Les sacristains de Beaurepaire soupçonnés d’avoir mis de la chaux dans le cercueil de la Paintrolière :
- Mathurin GIRARDEAU (décédé à la Conciergerie entre le 19 juin 1731 et le 24 mars 1733)
- Louis GIRARDEAU (fils de Mathurin)
- Pierre GIRARDEAU (autre fils de Mathurin)
Le 19 décembre 1731 il n’était plus que 6, le 31 mars 1732 il n’était plus que 4 et il ne restait que 3 survivants le 24 mars 1733, qui furent relaxés et remis en liberté à partir de cette date :
Charlotte BENOIT, et les deux frères Louis et Pierre GIRARDEAU.
Ces 8 emprisonnés et abandonnés de Beaurepaire, dont 5 laissèrent leur vie dans les
geôles,
sont les véritables victimes de ce procès.
Qu’est devenu Eusèbe GIRARD sieur de Beaurepaire ?
Entre temps Eusèbe GIRARD était en liberté ? puiqu’il est présent à Beaurepaire au mariage de Marie GIRARD fille naturelle du Père d’Eusèbe GIRARD avec Louis PAINEAU Le 7 juillet 1732 - On notera toutefois qu’Eusèbe GIRARD ne signe pas l’acte et il est fort possible que cela soit son fils Jacques Eusèbe confondu avec lui et non lui qui en soit le témoin.
En effet, le 24 mars 1733 il y eut un arrêt qui renvoya le procès un an plus tard pour la recherche de plus d’informations.
Et, c’est le 12 août 1734, par un arrêt du Parlement de Paris, que Eusèbe GIRARD
sieur de Beaurepaire (absent) fut jugé et absout (gracié) par contumace.
Eusèbe GIRARD est parrain de Louis Eusèbe PAINEAU le 27 février 1735 à Beaurepaire
- Il ne signe pas l’acte.
Son épouse, Elisabeth BOUTILLER, décéda et fut inhumée dans
l’église de Beaurepaire le 7 avril 1735.
Eusèbe GIRARD est présent au mariage de Charles
SAUDELET et de Charlotte le BŒUF le 4 février 1737 à Beaurepaire ; mais il ne signe
pas l’acte et c’est Jacques Eusèbe GIRARD son fils qui signe l’acte.
Je crois que cette présence d’Eusèbe GIRARD mentionnée notamment dans l’acte de 1737 est confondue avec son fils Jacques Eusèbe GIRARD.
Toujours est-il que Eusèbe GIRARD fut appréhendé (quand ?) et conduit en prison au Châtelet à Paris, et condamné à perpétuité. Il sera ensuite gracié en 1745 par Louis XV.
En effet, on voit qu’Eusèbe GIRARD fut inhumé dans l’église de Boufféré (Vendée) le 15 décembre 1750 !
SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES
sur le meurtre de la Pintrolière
REVUE
- Bulletin de la Société des Antiquaire de l’Ouest - 1er trimestre 1975 - 4ème série - Tome XIII l’article suivant : « une mystérieuse affaire : l’assassinat de Jean Thibault de la Pintrollière en 1728 » Par Gérard JAROUSSEAU, Pages 13 à 29.
LIVRES
- Œuvres de Mr. Cochin (volume VIII - page 460)
- Si Beaurepaire m'était conté : notes d'histoire locale recueillies par Jean-Marie Sourisseau 70 pages - novembre 1986 : page 19
ARCHIVES DÉPARTEMENTALES
- Archives départementales de Vendée : Registres paroissiaux de Beaurepaire et de divers villages
- Archives départementales de la Vienne : Procédures de la juridiction seigneuriale de Beaurepaire, du lieutenant criminel de Poitiers et de la maréchaussée générale de Poitou (Fond B I2 liasse 25)
ARCHIVES NATIONALES
- Lettres patente du 19 juin 1731, enregistrées le 28, qui renvoient l’affaire en la chambre de la Tournelle du Parlement de Paris (X 1B 9020).
- Interrogatoire de Mathurin et Louis Girardeau et de Charlotte Benoît et de René Rangeard, devant le Parlement, le 24 mars 1733 (X 2A 1097).
- Arrêt du Parlement du 31 mars 1732 (X 2B 970).
- Arrêt du Parlement de Paris du 24 mars 1733 (X 2B 972)
- Arrêt concernant le procès des auteurs de l'assassinat du Sr Thibaut de La Pintrollière commis au château de Beaurepaire, 1730, In-4 (22 cm)..In : Inventaire des arrêts du Conseil du roi : règne de Louis XV : arrêts en commandement : inventaire analytique. III-IV, 1724-1736 / Michel Antoine ; collab. Brigitte Schmauch. – N° 18353, p. 575
- Archives nationales d’Outre-Mer (Martinique correspondance) - cote FR ANOM COL Cba 40 Fa 61
BNF (Bibliothèque Nationale de France)
- [Factum Jean THIBAUD de la Paintrollière] texte imprimé in folio sans date, imprimerie
J. Faulcon à Paris :
« Mémoire présenté à Monsieur le prévôt général de la maréchaussée
et de Poitou et à Messieurs les présidiaux de Poitiers, au sujet de l’assassinat
commis dans la personne de Messire Jean Thibaud, sieur de la Paintrollière ». (BNF
: FRBNF36760318)
- [Factum Louis YON] texte imprimé in folio, 1731, signé Fuet, imprimerie de Paulus-du-Mesnil à Paris :
« Mémoire signifié pour Louis Yon, Françoise Germon, Louis Sachot, Charlotte Benoît, François Bonnet, domestiques du sieur de Beaurepaire [Girard] ; Mathurin Girardeau père, Mathurin Girardeau et Louis Girardeau ses enfans, sacristains de la paroisse de Beaurepaire, et René Rangeart, chirurgien du bourg de la Gaubretière, accusez et demandeurs... contre Me Nicolas Mallet, substitut de M. le procureur général en la maréchaussée générale de Poitiers, défendeur ». (BNF : FRBNF36763922)
- [Factum Eusèbe GIRARD de Beaurepaire] texte imprimé in folio. Poitiers, imprimerie Jacques Faulcon, sans date, 13 pages :
« Mémoire au procès criminel d'entre M. le procureur du roy, de la maréchaussée de Poitou, à la résidence de cette ville de Poitiers, demandeur et accusateur et Mre Eusèbe Girard, chevalier, seigneur de Beaurepaire, Mre René-Léon Doyneau, écuyer, seigneur du Chamblan, Mre Pierre Corbière, écuyer, seigneur de la Coussaye, Mre René Bruneau, écuyer, sieur du Plessis, Mre Paul Messine sieur de la Pignardière, défendeurs et accusés ». (BNF : FRBNF36767266) (Manuscrit Joly de Fleury, 2013, f° 287-293).
- [Factum Eusèbe GIRARD de Beaurepaire] texte imprimé sans date ni lieu, 5 pages :
« Réflexions contre un mémoire anonyme, donné au sujet du meurtre du sieur de la Paintrollière ». (BNF : FRBNF36767267) (Manuscrit Joly de Fleury, 2013, f° 294-296).
- [Factum Eusèbe GIRARD de Beaurepaire] texte imprimé in folio, 1733, signé Marais, imprimerie de Gissey à Paris, 7 pages :
« Observations sur la contumace, dans le procès criminel poursuivi à la requête de M. le procureur général contre le sieur Girard, seigneur de Beaurepaire et autres accusés ». (BNF : FRBNF36767268) (Manuscrit Clairambault, 1084, f° 42-45).
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